Mange-t-on trop de viande en France ?

La consommation de viande de boucherie (bœuf, porc hors charcuterie, veau, agneau et viande chevaline) s’élevait à 390 grammes par semaine pour un adulte en 2010 et à 320 g en 2016. Cette consommation est en baisse depuis maintenant 10 ans. 

Le danger d’une consommation trop élevée de viande est soulevé pour les gros consommateurs de viande. A contrario, les femmes et les seniors sont exposés à des risques d’insuffisances en certains nutriments.

À quels risques s’expose-t-on vraiment en consommant trop de viande ? Quelle est l’importance réelle de la cuisson ? Quels sont les atouts nutritionnels de la viande ?

Pour ce troisième numéro de « C’est pas Tranché », Mariette Gerber, Médecin épidémiologiste, Chercheur honoraire INSERM, attaché au centre de recherche sur le cancer de Montpellier, Thierry Harvey, Gynécologue-obstétricien, Chef du service Maternité à l’hôpital des Diaconesses Croix Saint-Simon à Paris et Elise Cotto, Gériatre au sein de l’hôpital des Diaconesses Croix Saint-Simon, répondent à nos questions et échangent sur les atouts de la viande et les risques d’une trop grande consommation.

Les clés pour comprendre

L’importance du profil alimentaire et des modes de cuisson

Les risques éventuels d’une consommation excessive de viande pour la santé peuvent varier en fonction du profil alimentaire. Le profil alimentaire « occidental », celui du gros consommateur de viande (plus de 490 g par semaine) mais pas assez de légumes, de fruits ou de laitages, est le plus exposé aux maladies cardiovasculaires et au risque de cancer. En revanche, le profil alimentaire « méditerranéen » qui consomme fruits, légumes, viande et poisson en quantité modérée et cuisine à l’huile d’olive est plus favorable. 

La cuisson de la viande peut également représenter un facteur de risque pour la santé. Il faut notamment éviter le barbecue et varier les cuissons, et pourquoi pas, consommer la viande crue ! Le Dr Mariette Gerber recommande aussi de choisir les morceaux les moins gras (escalope de veau, filet de boeuf, bavette…) et de les cuisiner en limitant l’ajout de matières grasses ou de sauce, vecteurs d’acides gras saturés, susceptibles d’entraîner des maladies cardiovasculaires.

Les carences chez les femmes

On constate que les femmes, qui sont, en général, de plus petites mangeuses de viande (une portion de 109 g trois fois par semaine), ont souvent un apport carné insuffisant. La viande permet pourtant de lutter contre la carence en fer, dont souffrent 39 % des femmes de 18 à 29 ans et 18 % des femmes de plus de 30 ans. Saviez-vous que les femmes ont des besoins en fer deux fois plus importants que les hommes ? Cette différence se ressent tout d’abord au moment des règles, qui surviennent chaque mois. Mais surtout pendant la grossesse, qui conduit la mère à puiser dans ses réserves en fer pour éviter de carencer l’enfant. La carence en fer des femmes enceintes peut conduire à l’anémie et augmente les risques d’hémorragie de la délivrance, lors de l’accouchement. La solution selon le Dr Thierry Harvey ? Profiter de la période de la grossesse pour adopter de bonnes habitudes alimentaires, et consommer de la viande en quantité suffisante. Ce moment d’éducation nutritionnelle est essentiel pour la santé des femmes et de leurs futurs enfants.

Les carences chez les personnes âgées

La viande permet aussi de lutter contre la dénutrition des personnes âgées de plus de 75 ans. 50 % des seniors hospitalisés présentent des signes de dénutrition. Les seniors carencés courent le risque d’entrer dans une spirale de la dénutrition, qui conduit à une perte de protéines musculaires, corollaire à une perte de l’appétit et à la diminution des sensations gustatives. Contrairement aux idées reçues, les besoins protéiques des seniors sont plus élevés que chez l’adulte plus jeune. La viande est un atout santé pour cette partie de la population, exposée au risque d’une insuffisance de certains nutriments. Facilement assimilable, elle apporte de la vitamine B, du fer, des oligo-éléments et favorise la synthèse des protéines musculaires. La solution selon le Dr Elise Cotto ? Augmenter la proportion de viande dans les menus des seniors.

L’indispensable équilibre alimentaire

Accompagnée de légumes et de féculents, dans le cadre d’un repas structuré, la viande, consommée plusieurs fois par semaine, contribue à l’équilibre alimentaire. Une portion de viande équivaut à 100 g, soit par exemple un steack haché ou une côte d’agneau. La viande apporte à l’organisme des protéines d’excellente qualité, ainsi que du fer en quantité, des vitamines B12 et PP, mais aussi du zinc. L’ensemble de ces éléments est indispensable au bon fonctionnement du corps humain.