L'élevage nuit-il à notre planète ?

Les vaches seraient responsables des 11 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Pour produire un kilo de bœuf, il faudrait 15 000 litres d’eau, soulignent les associations environnementales pour qui le développement de l’élevage mettrait en péril notre éco-système. Arnaud Gauffier, Chargé de l’Agriculture durable au WWF et Patrick Bénézit, éleveur et vice-président de la Fédération nationale bovine, livrent, à travers le deuxième débat « C’est pas tranché », leur analyse respective de l’impact de l’élevage sur notre environnement.

Les clés pour comprendre

Quel impact environnemental pour l’élevage ?

Contrairement à une idée reçue*, l’élevage ne consomme que 8 % de l’eau utilisée en France. Pour produire un kilo de bœuf, il faut 200 litres d’eau environ. Celle-ci sert principalement à abreuver les animaux. Elle est également utilisée pour nettoyer les bâtiments ou pour irriguer les cultures destinées à nourrir le bétail. De leur côté, les 13 millions d’hectares de prairies permanentes, sur lesquelles tombent l’eau de pluie, constituent 40 % de la ressource annuelle en eau du pays et contribuent à la préservation du paysage. Elles jouent un rôle écologique clé, notamment dans la régulation des crues et le maintien de la qualité de l’eau. Les prairies contribuent également à lutter contre l’émission de gaz à effet de serre. Chaque année, elles stockent une tonne de gaz à l’hectare, soit 75 % des rejets émis par les ruminants.

En 2006, la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) a estimé que l’activité liée à l’élevage représenterait, au niveau mondial, 18 % des émissions de gaz à effet de serre. En France, la part de ce secteur s’élève à 11 %. L’élevage émet trois types de gaz à effet de serre : le CO2, le méthane et le protoxyde d’azote. S’il est difficile d’agir contre la production naturelle de méthane par les ruminants, émise lors de la digestion du fourrage, les éleveurs veillent à économiser l’énergie, en réduisant leur consommation de carburant dans les tracteurs, pour chauffer les bâtiments d’élevage ou faire fonctionner la machine à traire. Ils récupèrent l’énergie solaire et transforment en biogaz les déjections et les déchets organiques.

Le modèle d’élevage français est-il vertueux ?

L’élevage extensif, tel qu’il est pratiqué en France, participe à la biodiversité, à l’entretien des paysages, à la régulation des crues et à la vie des territoires. La prime herbagère agro-alimentaire distribuée dans le cadre de la Politique Agricole Commune permet de soutenir le modèle de l’élevage herbivore. En contrepartie, l’éleveur s’engage à limiter les apports d’engrais et de fumier et à préserver les haies et les talus. Pourtant, face aux difficultés du métier d’éleveur, 5 millions d’hectares de prairie, soit 30 % de leur surface, ont disparu en France ces trente dernières années.

Le bilan carbone est-il un indicateur fiable ?

Le bilan carbone d’une activité humaine ou économique est un outil de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre. Le méthane, rejeté par les ruminants lors de la digestion, et le dioxyde de carbone, émis par les machines et les véhicules rentrent dans le calcul du bilan carbone de l’élevage. En revanche, le bilan carbone ne prend pas en compte les effets de la biodiversité, les retombées économiques ou le bilan énergétique global de l’activité. De fait, il reflète mal l’impact environnemental de l’élevage en France. 

En effet, les ruminants, lorsqu’ils broutent les prairies permanentes contribuent à limiter l’érosion des sols. Ils entretiennent le paysage en luttant contre les risques d’incendie dans le sud ou d’avalanches en montagne. La présence de prairies en alternance avec des parcelles cultivées sur l’ensemble du territoire permet de préserver le sol et la qualité des eaux. Enfin, le système d’élevage français permet de faire vivre économiquement des régions entières.

* De récents chiffres publiés par l’International Water Management Institute estiment qu’il faudrait 15 000 litres d’eau pour produire un kilo de viande. Ce chiffre cumule trois volumes d’eau d’origine différente : l’eau bleue, qui sert à l’abreuvement des animaux, à l’irrigation des cultures fourragères et à la transformation des produits d’origine animale ; l’eau grise qui correspond à l’eau utilisée pour la dépollution et l’eau verte, c’est-à-dire l’eau de pluie stockée dans le sol sous forme d’humidité et qui s’évapore via les surfaces cultivées ou les prairies. Interbev conteste fermement la comptabilisation de cette eau verte dans l’eau nécessaire à la production de viande.

Source : Institut de l’Elevage, Interbev.